Le film de Julien Duvivier sort sur les écrans en 1952. L’intrigue met aux prises dans un village de la plaine du Pô le curé et le maire sur fond d’Italie rurale à la sortie de la guerre. Progrès et tradition s’affrontent, mais tout cela reste bon enfant. Les deux protagonistes sont d’abord des amis, conscients, au-delà des enjeux politiques d’être avant tout des hommes. Forces, faiblesses, différences. Mon père, ça le faisait marrer les macaronis en train de s’engueuler.
«Des pâtes, des pâtes… oui mais des Panzani ! »
En français qui plus est, cocorico!, avec Fernandel au sommet de son art, juste avant de se faire voler la vedette par don Patillo.
Le film de Julien Duvivier sort sur les écrans en 1952. L’intrigue met aux prises dans un village de la plaine du Pô le curé et le maire sur fond d’Italie rurale à la sortie de la guerre. Progrès et tradition s’affrontent, mais tout cela reste bon enfant. Les deux protagonistes sont d’abord des amis, conscients, au-delà des enjeux politiques d’être avant tout des hommes. Forces, faiblesses, différences. Mon père, ça le faisait marrer les macaronis en train de s’engueuler.
«Des pâtes, des pâtes… oui mais des Panzani ! »
En français qui plus est, cocorico!, avec Fernandel au sommet de son art, juste avant de se faire voler la vedette par don Patillo.
La dolce vita sort huit ans plus tard. On est toujours dans le miracle de la reconstruction. Un Frédéric Moreau en paparazzi, s’échine à trouver l’amour et le bonheur. Une scie. Flaubert avait réinventé le genre en 1869, Fellini l’actualise 100 ans plus tard. Cette fresque romano branchée est toujours d’actualité. Les agences de pub y puisent à l’infini un fatras d’images à refourguer. Fellini dénonçait le parc d’attractions à venir, elles détournent le sens, mais l’ont-elles compris ? En rajoutent jusqu’à l’écoeurement. Le besoin de catégoriser est leur refuge. Au moins, avec Peppone, on sort du cadre. Trop ringard, trop daté. Tant mieux, nous pouvons nous concentrer sur l’essentiel, sans courir après le superflu.
En 2016, le gouvernement italien dissout la municipalité de Brescello. Le village a abrité le tournage de la série don Camillo. Une statue en pied de Peppone trône sur la place centrale. Motif de l’intervention, infiltration mafieuse. Un coup de filet a permis d’arrêter 160 personnes liées à la Ndrangheta. Depuis une vingtaine d’années, la mafia est présente en Emilie-Romagne et place des personnes de confiance au sein des entreprises, des administrations et des forces de l’ordre locales. Décidément, on ne peut se fier à personne…
Le gars à ma gauche sur la photo qui ressemble à un raisin de Corinthe et me fait passer pour le géant des Carpates, c’est Pépito. Enfin, je dis ça, je dis rien. J’ai oublié de lui demander son prénom.
Brescello est une petite ville de la plaine du Pô au nord de Parme. Elle servira de décor pour le tournage de la série Peppone et don Camillo. Le premier épisode date de 1951. Pépito a 10 ans. Chemise blanche et culottes courtes, au premier plan d’une foule réunie sur la place centrale. Il tend le bras comme pour dire au revoir. Trois secondes, un bus passe, c’est terminé.
Dès sa sortie, le film a été censuré par le Vatican. La gauche italienne elle, n’a pas apprécié la stigmatisation du maire communiste. En route pour un Oscar, la CIA en plein Maccarthysme a jeté le discrédit sur l’oeuvre la jugeant trop rouge.
Nous avons un destin commun Pépito et moi ou plutôt une névrose commune. Elle a des moustaches, la tronche de Mario Bros et hante nos vies à tous les deux. Lui, sa carrière cinématographique s’est arrêtée aussi vite qu’elle a commencée. Il a dû faire le grand quelque temps avant que n’ouvre le musée. Un vrai soulagement. Il pourrait remettre ses habits d’enfant et rejouer la scène. L’enthousiasme serait le même. A la sortie du bourg, il y a un pont de pierre qui enjambe l’énorme talus, protection nécessaire contre les crues du Pô. Des peupliers immenses s’étendent à perte de vue, donnant au lieu une symétrie apaisante.
Bertolucci a tourné quelques scènes de son film 1900 dans les environs. C’est Pépito qui me l’a dit. Il m’a promis de m’y emmener.
Elle commence en 1975 par la création de l’établissement éponyme à grands coups de contorsions financières du plus très jeune Dino Balducci. Emigré italien, vendeur de machines à coudre, produit de l’incurie des dirigeants transalpins d’après-guerre, coincés entre le mirage de la reconstruction, le modèle yankee et l’immobilisme moyenâgeux des latinfundistes puglieses.
Suivent des années de gloire : le français aime beaucoup les histoires, surtout quand le conteur reste à sa main. Après tout, le camp des vaincus n’avait qu’à bien se tenir ayant su profiter des largesses de l’état providence : éducation, formation. La pizza devint à la mode. Les nappes à carreaux, les fiasques de chianti et gouaille des serveurs rendaient le restaurant moins conventionnel inaugurant par la même de nouvelles habitudes alimentaires favorisées par le pouvoir d’achat et la désaffection progressive des femmes aux fourneaux. La grande distribution naissante s’engouffra dans cette brèche et sut profiter de la générosité de ces pionniers s’appropriant les valeurs et les pratiques d’un monde révolu pour en faire un business lucratif, peu regardante sur les provenances et les traditions détruites peu à peu au nom du profit.
Restait à faire le voyage dans l’autre sens. A l’orée des années 2000, nous nous appropriâmes un territoire. De long en large, des milliers de kilomètres, l’italien en 10 leçons, évitant les grands axes, peu sensibles aux mains lisses retournant chaque fois chargés de trésors, de rencontres et d’espoirs déçus.
D’autant que de nouvelles pratiques voyaient le jour, loin de la macdonalisation des consciences. Les centres commerciaux poussaient comme des champignons : tant mieux ! Nous suivions amusés le transit des denrées importées à grands renforts d’intermédiaires, de publicités et de main d’œuvre servile.
Fermons le livre d’images : le passé nous coupe d’une réalité dont la vitesse et la brutalité augurent des lendemains de gueule de bois. A nous d’impulser une autre modèle, d’inventer un autre langage. Loin des afféteries de coquettes propres aux marchands prêts à nous vendre leurs corps car pour ce qui est de leurs âmes, il y a bien longtemps qu’on n’en fait plus état.
Réussir à rester authentique tout en se tournant vers l’avenir. Depuis deux décennies, Peppone n’est plus une pizzeria, ni une trattoria, c’est Peppone avec ses « Ragazzi ».
Parce que nous avons su anticiper producteurs, circuits, jardins, fabrication, formation, nous sommes devenus une marque et revendiquons notre différence. Aujourd’hui, le report des crédits et l’avenir en pointillé doivent nous surmotiver. Laissons les têtes de gondole taper sur des casseroles et profitons-en pour prendre une longueur d’avance… Comme nous l’avons toujours fait.